Margarete Ward
16 octobre 1890 - 17 octobre 1977
La raison qui m’a motivé à réaliser Gong Hee Fot Choy, ce jeu de diseuse de bonne aventure, était de donner au peuple américain un peu de la philosophie subtile des ancêtres des Chinois.
Je rencontre beaucoup de personnes qui veulent savoir comment j'ai pu entreprendre l'étude de la philosophie chinoise et des enseignements de leurs religions. Dans le texte qui suit, je vais m'efforcer de l’expliquer.
Quand je vivais en Chine, j'ai été présentée, par un ami américain, à un gentleman chinois, dont le nom était Kwan Tsi Ching. M. Ching était riche et comme tous les Chinois riches, il possédait un vaste domaine de la taille de l’un de nos pâtés de maisons.
Quand j'ai rencontré M. Ching, il m'invita chez lui pour visiter sa famille. Je n’oublierai jamais l'après-midi où je suis allé à sa maison de thé. À quelques minutes de route de chez moi, mon chauffeur s'est arrêté devant un grand mur ayant une ouverture juste assez grande pour y entrer ma voiture. Le mur avait deux pieds d'épaisseur et douze pieds de haut et sur le dessus du mur, encavés dans le ciment, il y avait de gros morceaux de verre brisé. Comme j'avais appris lors d'autres voyages à l'étranger, à ne pas poser de questions, je n’ai fait aucun commentaire.
Lorsque je me suis retrouvée à l'intérieur de la haute muraille et que les portes ont été solidement fermées, il m'a accueilli dans l’un des plus beaux jardins que j'ai jamais vus. En souriant, je l'ai regardé et un des serviteurs de M. Ching m'a aidé à sortir de ma voiture et escorté jusqu’à la grande maison qui s'élevait majestueusement dans le jardin. Le portier m’a très poliment escortée par un hall spacieux dans le grand salon ou salle de réception. Dans le hall, un escalier massif sculpté dans du bois de teck m’a conduit à l'étage supérieur. Comme il s'agissait de ma première visite dans une maison chinoise, c'est avec une certaine difficulté que je cachais mon étonnement, mais j'ai continué à sourire et à donner l'impression que j'étais heureuse et contente d'être là.
La chaise qu’on m’a offerte était aussi délicate qu’il est possible de l’être, tapissée de soie rose brochée, dans un cadre léger et sculpté à la main. Certes, je n'étais pas très à l'aise ; mais c'était une œuvre d’art, comme tout le mobilier dans cette pièce. Dès que je me suis assise, le serviteur a quitté la pièce très poliment et fermé la porte du salon en silence. Par une autre porte, M. Ching a fait son apparition vêtue d'une magnifique robe de soie et un manteau d’après-midi chinois. L'une de ses six femmes le suivait, elle s'inclina et souriait, c’était celle qui pouvait converser en anglais.
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