Chroniques Qigong Chinois

Résumé de lecture de La fièvre du qigong par Robert Boudreault



 

La fièvre du qigong : guérison, religion et politique en Chine, 1949-1999,
par David A. PALMER
Éditions de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales, Paris, 2005, 511p.


 
Chroniques sur le Qigong chinois
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 3- Le qigong se pratique sous la forme de rites simples ; à heure fixe tous les jours, en un lieu précis, le corps orienté dans une direction précise, suivant un enchaînement précis de postures et de techniques encadrées par des « postures préparatoires » (yubeishi) et des « postures de clôture » (shoushi) d’une durée précise (généralement entre dix minutes et trois heures (pp.44-45).

La première institution au monde spécialisée dans le qigong a vu le jour en mars 1954, dans la ville de Tangshan, au sanatorium des Travailleurs de Tangshan, sous la direction de LIU Guizhen (p.49). En 1955, fondation de l’Académie nationale de médecine chinoise (Zhongguo zhongyi yanjiuyuan) à Pékin (p.51). Durant la période 1955-1958, on assiste donc à l’organisation d’un vaste système institutionnel moderne de médecine chinoise. LIU Guizhen est honoré par Mao comme « travailleur pour le progrès » et sa méthode, dérivée des enseignements de LIU Duzhou, se répand partout (p.54). Les centaines de méthodes de qigong proposées par les différentes lignées dans les années 1980 et 1990 seront essentiellement des variations sur le même thème de la triple discipline. Elles comportent toutes les caractéristiques suivantes : réduire l’activité mentale, détendre tout le corps, portes des vêtements amples, vider son corps de selles et d’urine avant de commencer la pratique, répéter (silencieusement) une formule orale (p.55).




En 1960, début de la lutte de Mao contre l’appareil du Parti communiste, dont WANG Juemin, promoteur du qigong. À partir de 1965, plus rien. Le qigong est stigmatisé comme « reliquat pourri du féodalisme » et LIU Guizhen, expulsé du Parti, est accusé d’être l’« inventeur de l’herbe à poisons du qigong » (p.63). Pour plus de détails historiques sur cette période, voir la thèse de doctorat de Évelyne MICOLLIER : Un aspect de la pluralité médicale en Chine populaire. Les pratique de Qi Gong – Dimension thérapeutique / dimension sociale, Université de Provence (Aix-Marseille I), 21 décembre 1995. De même son article Entre science et religion, modernité et tradition : le discours pluriel des pratiquants du qigong dans le livre édité par J. Benoît : Soigner au pluriel. Essais sur le pluralisme médical, Paris, Karthala, p.205-223.

 Pendant la Révolution culturelle, le qigong n’est plus considéré comme une activité légitime. Sauf pour Mme GUO Lin [LIN Guanming], une artiste peintre dont le grand-père paternel était maître taoïste du Temple de l’Esprit de la Médecine à Macao et lui avait enseigné une méthode de culture corporelle pour enfants, dès l’âge de six ans. Elle apprendra plus tard le Jeu des Cinq Animaux de Hua Tuo (p.71). En 1949, cancer de l’utérus qui se propage vers sa vessie. Amputation totale de l’utérus et partielle de la vessie. Récidive en 1959. Elle se met à l’étude intensive et à la pratique du qigong. Après 10 années, elle se guérit. Elle fait la synthèse de sa méthode basée sur la « respiration éolienne » (feng huxifa) dans laquelle certains aspects de la culture corporelle traditionnelle et du qigong de LIU Guizhen sont modifiés. Après avoir guéri deux de ses élèves atteints de cancer, elle commence à enseigner en 1970, puis dans les parcs publics en 1971. Elle sera constamment arrêtée par les agents de la Sécurité publique, se déplaçant chaque fois dans un nouvel endroit pour enseigner. Elle continue malgré tout, certains cadres du Parti ayant recouvré la santé, tel GAO Wenshan. En 1977 (Mao est mort en 1976), elle est accueillie à l’Université normale de Pékin, et sa Nouvelle méthode de qigong sera publié à plusieurs reprises à partir de 1978 (p.71-75). En 1978, le gouvernement lance un « Mouvement patriotique pour la santé » (Aiguo weisheng yundong) afin d’améliorer l’état de santé et d’hygiène de la population. …Le qigong, par sa simplicité, son efficacité et son aspect économique, s’inscrira très bien dans les objectifs de ces campagnes (p.75). Le 14 juillet 1979, le ministère de la Santé organise une « réunion de synthèse sur la science du qigong » à Pékin, où sont présents des ministres et des scientifiques, et où feront sensation les expériences de GU Hansen sur le qi externe. Cet événement donnera naissance à ce qu’on appellera le « monde du qigong » et à la pensée que qi externe + pouvoir mental = pouvoirs paranormaux (p.80-81). En cet été 1979, scission au sein du groupe de Mme GUO Lin, ZHANG Mingwu crée sa propre lignée qu’il appellera Méthode d’autothérapie par le qigong. Il sera l’un des fondateurs de l’Association de Pékin pour l’étude du qigong. Le qigong médical institutionnel d’avant la Révolution culturelle est réhabilité par l’ouverture du sanatorium de Beidaihe le 28 octobre 1980, sous la direction de LIU Guizhen (p.82). Parmi le noyau le plus actif, on trouve PANG Heming. Les maîtres ont une affiliation médicale, éducative, scientifique ou technique, politique, arts martiaux, sportive, culturelle, militaire/policière ou religieuse (p.96).


(*) BOUDREAULT Robert « Le Petit Yang : dictionnaire synthèse de taiji quan pour débutants », Les Ateliers de Tai Ji, St-Nicolas (Québec), 1997, 65 p.